N. Gallimard 2002
Traduction de Philippe Di Meo
Ile d’Elbe, hiver 1814-15. Martino Acquabona, homme de lettres et propriétaire de l’Ile d’Elbe, voue une haine farouche à Napoléon, qu’il appelle Orge et Grand Croque-Mort, en lui reprochant les centaines de milliers de morts qu’il a fait sur les champs de bataille d’Europe. Mais quand l’Empereur déchu arrive sur cette petite île au large de la Toscane, seul morceau d’un pouvoir qui fut immense, l’ironie de l’Histoire voudra qu’il soit nommé bibliothécaire de Napoléon, et donc placé à un poste d’observation idéal au milieu de la petite cour de l’illustre exilé. Il pourra épier le Héros retourné à son rôle du départ, un bourgeois extrêmement habile dans ses affaires, et découvrir petit à petit les aspects inconnu de sa personnalité: “J’avais décidé de l’étudier comme on peut étudier les symptomes de la syphilis, les poisons des serpents, la nature du Diable”.
Acquabona devient le témoin, le chroniquer et l’exégète de ce bizarre interlude des troiscents jours qui portent à retour en France et à Waterloo ; et plus encore de l’entière courbe de Napoléon, qu’il cherchera de modifier avec un geste extrême, après avoir subi la fascinantion de l’homme qu’il déteste.
Les Mémoires d’Acquabona racontent les effects de l’arrivée impériale sur les habitants de l’Elbe et sur soi même, la cohabitation avec la cour et les généraux fidèles, tels que Drout et Cambronne ; l’arrivée de Pauline et de Madame Mère, l’attente de Marie Louise, la visite secrètes de Maria Walewska, le climat de siège qui pousse N. à tenter la dernière aventure. Petit à petit, entre l’Empereur et son bibliothècaire démarre un dialogue sur deux façons de vivre et d’entendre un bonheur possible : modifier incessamment le monde à travers l’action éroïque, ou bien chercher de lui donner un sens avec l’écriture.
Fondé sur un documention rigoureuse et conduit avec une admirable tension stylistique, N. n’est pas seulement une subitle réflexion sur les paradoxes de l’histoire et du pouvoir, sur les ” rélations dangereuses ” entre le tyran et les foules, sur la guerre, la mort et l’amour, mais aussi un roman original et captivant qui parle de nos jours.
Opinions sur N
De ces neuf mois baroques et ridicules à la fois de l’ile d’Elbe, qui ont vu un géant arpenter son royaume de Lilliput, Ernesto Ferrero a tiré un roman fascinant, N. Son succès en Italie fut foudroyant. Il devrait l’être en France…Ferrero se met dans la peau d’un patriote italien qui veut tuer l’Empereur, bourreau de son pays. Mais, comme il est bibliothécaire, il n’ose pas. C’est tout le drame de la civilisation devant la force qui est conté dans ce journal d’une rélegation, qui n’est pas celle de Bonaparte, ma celle de tous les impuissants de l’Histoire. C’est-à-dire nous tous.
Un beau roman, lucide et aigu sur toutes les vanités, d’auteur ou de généraliny.
Un chef-d’oeuvre de subtilité et de nostalgie
…Un roman qui par son mouvement aurait enchanté Giono et qui comble de fiction l’un des interstices de l’Histoire que l’on ne regarde jamais de près…Verdi en aurait sans doute tiré un opéra, mélancolie et fièvre alternant d’une façon qui ôte au roman historique sa part d’arbitraire et réintroduit l’incertitude de l’humain dans le genre où, purtant, tout est joué d’avance. Avec son deuxième roman, l’auteur se place d’emblée très haut
N. reste un texte saisissant sur la façon dont s’écrit l’histore et dont se fait la légende…Le récit ample de cette année d’exil compose una méditation belle et désenchantée sur la place de chacun dans le monde et dans l ‘histore, sur les arrivées et les retours ou, plus simplement, sur l’insularité, à la fois ici cadre et image tant ‘les îles n’ont d’autres landemains que les départs’